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Le Festival de Hyères rassemble chaque année la fine fleur de la jeunesse créative, l’occasion pour TTT magazine de rencontrer ces designers qui marqueront demain. Bien qu’ils diffèrent tous dans leur parti-pris stylistique, la plupart des compétiteurs convergent dans la dimension écologique, au regard des perspectives anthropocèniques actuelles. L’urgence de cette nécessité, un point déterminant dans la victoire du couple Botter l’année précédente, mais aussi de Christoph Rumpf lors de cette dernière édition.

Originaire de Taiwan, Tsung-Chien Tang est installé en France depuis ses 18 ans. Une Mise à Niveau en Arts Appliqués à l’ENSAAMA (Olivier de Serres), puis un passage par l’école Duperré, en parcours textile et environnement, il a terminé ses études au sein de l’AICP en décembre dernier. En lice lors de cette 34ème édition du Festival de Hyères, Il y est venu présenter sa première collection.

Que représente le Festival de Hyères pour vous ?

C’est une très grande opportunité pour moi de collaborer avec les Métiers d’Arts de Chanel, nous avons pu travailler la maroquinerie ensemble, Supima nous a fourni certains tissus haut de gamme, enfin, nous avons développé un parfum, Thunderstorms in the Afternoon, en partenariat avec le fabricant d’arômes cosmétique Givaudan. Ce festival représente une réelle visibilité pour moi.

Thunderstorm in the Afternoon Givaudan
Thunderstorm in the Afternoon Givaudan

© Tsung-Chien Tang

Thunderstorm in the Afternoon Givaudan

Quelles ont été vos inspirations ? 

Le grunge de Marc Jacobs, le punk de Vivienne Westwood. J’aime l’étrangeté chez Rick Owens, l’uniformité et la technicité chez Yohji Yamamoto et Azzedine Alaïa, la créativité de Rei Kawakubo et Margiela. Ces créateurs me sont capitaux, en montrant la nécessité d’être consistant, fidèle, honnête et intransigeant envers le monde de la Mode. 

J’ai trouvé le vestiaire masculin, en général, trop peu « décoratif » comparé au vestiaire féminin, je me suis alors demandé pourquoi l’homme serait nécessairement dénué d’ornements. Détourner les fonctions m’a permis d’explorer les possibilités d’embellissements, de constructions de la forme. C’est notamment dans la récupération de tissus d’ameublement, précédée par des heures et des heures de travail à la main, que j’ai finalement pu aboutir à cette collection multidimensionnelle, aux tonalités chaudes, à la fois romantique et nostalgique. Alliage entre la mélancolie et l’espoir, la lumière dans le noir, la passion et la colère, j’ai trouvé les inspirations qui font parties de ma vie quotidienne et sentimentale.


« C’est toujours intéressant de travailler avec des objets qui ont déjà une vie, comme pour raconter leurs histoire. »


Comment débute votre processus créatif ? 

Le processus créatif est toujours instinctif. Les gestes sont intuitifs, c’est par la pratique que l’on améliore ces mains et ces yeux. Tout comme l’écriture d’un peintre, c’est une sensibilité. Il ne démarre jamais avec un dessin. L’intérêt que je porte au repurposing, dans l’idée de collecter et de réapproprier une matière dans une fonction nouvelle, me pousse d’abord à manipuler le tissus, les drapés et les épaisseurs. Cette première approche avec le textile facilite la projection que j’ai, de celui-ci, sur un corps humain. Le repurposing coûte peu, il est même souvent gratuit, je l’utiliserai encore pour mes prochaines collections. C’est toujours intéressant de travailler avec des objets qui ont déjà une vie, comme pour raconter leurs histoire. Raconter à travers les couleurs, les textures et les décorations. 

Festival de Hyères 2019
Festival de Hyères 2019
Festival de Hyères 2019

© Tsung-Chien Tang

Quel regard portez-vous sur la mode et quelles sont vos ambitions dans ce domaine ? 

À l’école et en stage en entreprise, je voyais la quantité de toile et de tissu coupée, puis jetée. La vue d’un tel gaspillage me faisait un pincement au cœur, ces étoffes avaient encore de la valeur. La gestuelle de ne pas gaspiller et de systématiquement recycler m’a été éduquée très jeune à Taïwan. Ma démarche est simple : faire le maximum avec le minimum.

 À l’issue de ce festival, je souhaite monter ma propre marque, réaliser des projets avec d’autres créateurs et poursuivre la collaboration avec les Ateliers de Verneuil (un des Métiers d’Art de Chanel spécialisé dans la maroquinerie, ndlr) J’ai postulé également à l’IFM pour intégrer le Master of Arts and Design Menswear. Mais le plus important, c’est de continuer à faire ce que j’aime et contempler la diversité de ce monde. La scène créative s’ouvre de plus en plus aux personnes de couleurs et je m’en réjouis. 

Les pièces de la première collection de Tsung-Chien Tang seront présentées chez Tranoï à partir du 21 juin, ainsi qu’un look lors de la deuxième édition du Supima Design Lab à l’Hôtel Talleyrand.

Tranoï

Palais de la Bourse
28 Place de la Bourse, 75002 Paris
Du 21 au 23 juin 2019

Supima Design Lab

Hôtel de Talleyrand
2 Rue Saint-Florentin, 75001 Paris, France
En septembre prochain, lors de la première semaine des collections de Prêt-à-Porter

Photographie d’illustration – Défilé du 34e Festival de Hyères – Tsung-Chien Tang © Benjamin Rouan

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