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Lettre à Sophie Fontanel

Dans sa lettre ouverte, TTT se penche sur la joyeuse journaliste, écrivaine et instagrameuse Sophie Fontanel, et son indéfectible confiance en la beauté. 

Chère Sophie,

Il est tellement plus simple d’écrire à quelqu’un qui ne se livre pas, quelqu’un de mystérieux, car alors il est naturel de tomber à côté de la plaque : la tentative est touchante, appréciable, peut-être même honorable.

Avec vous, qui vous livrez avec tant d’élégance, tant d’entièreté et tant de gaieté, on se dit qu’on n’a pas droit à l’erreur, qu’il faut forcément tomber juste puisqu’on vous connaît. Bien sûr qu’on vous connaît, on a lu vos livres, pas tous mais au moins un, au moins deux. On lit vos articles dans l’Obs, on vous suit avec délectation sur Instagram, on vous connaît, c’est sûr ! Vos stories, on s’en nourrit, on s’en gave, on n’en est jamais gavé, on en redemande et vous en redonnez, alors comment pourrait-on ne pas vous connaître, vous dont la poésie urbaine et digitale se déverse à torrent, à foison ?

« Ces petits riens et ces grands touts, vous les croquez, vous les partagez, et vous donnez une leçon de savoir-être à chacun. »

Et pourtant, je n’arrive pas à vous dire. Peut-être parce que j’ai trop à vous dire. Vous dire que vous m’agacez à être si libre quand moi je n’y arrive pas. Vous dire que votre gaieté quasi-permanente est tout à la fois un rayon de soleil et starter d’agacement. Vous dire que si la Terre entière ne vous suit pas, c’est qu’elle est jalouse.

C’est indécent cette liberté avec laquelle vous jouissez de la vie. Indécent et émouvant, provoquant et tout ce qu’il y a de plus normal. Ces petits riens et ces grands touts, vous les croquez, vous les partagez, et vous donnez une leçon de savoir-être à chacun. Lorsqu’on vous lit, lorsque je vous lis, ou vous écoute, il y a cette franchise dans votre ton, cette incrédulité de savoir que tout le monde ne voit pas comme vous, alors que c’est tellement plus beau de regarder le monde comme vous avec des yeux débridés. Alors vous décryptez, vous donnez sa part à chacun, et peut-être que chacun donne sa part à chacun, et voilà comment les petits pas cheminent loin.

« Il y a encore certaines personnes suffisamment imprégnées de cette nécessité d’être courtois »

Oui vous parlez de vous, Sophie, mais parler de soi quand on a conscience que tout le monde va s’y retrouver, est-ce vraiment parler de soi ? Quand on décille un peu les yeux de ceux qui n’osent pas voir de la mode l’aspect le plus intéressant, ce sourire indulgent envers la faiblesse humaine, déciller ces-yeux-là, est-ce narcissique ?

C’est cela qui parfois peut interpeler : ce reflet qui est toujours le vôtre, ou presque. Comment ne pas se demander si vous n’êtes pas siphonnée du miroir, si vous n’êtes pas Dorian Gray ou la Castiglione ?

Et puis, si l’on réfléchit un peu, un peu plus que le temps de regarder une storie ou un post Instagram, même un peu plus que le temps de lire un de vos articles, on se dit que tout de même, il y a une raison pour qu’on ressente toujours ce même plaisir tranquille à regarder votre vie.

« L’élégance est simplicité, le sourire est simplicité, la sincérité est simplicité. »

C’est que, contrairement à ces gens qui se montrent, s’exhibent, se plaisent à plaire, même si vous aimez plaire, vous, Sophie, vous désirez seulement montrer à quel point le monde peut être courtois et joli. Le mot joli est souvent dénigré au masculin, mais il est tendre, et c’est, je crois, ce que vous aimez le plus de la part du monde. Qu’il soit tendre, joli.

Alors oui, parfois je me sens frustré de ne pas vous voir dire de méchancetés, comme une accoutumance à une drogue dont je n’aurais pas mesuré la perversité. Parfois je me dis que vous mentez. Que vous nous abreuvez d’un sucre faux. En vérité je dois l’admettre, je suis impressionné de voir qu’il y a encore certaines personnes suffisamment imprégnées de cette nécessité d’être courtois, pudique sur la laideur et généreux sur la beauté. C’est un tact rare que de choisir de ne donner que le meilleur de soi, sa joie !

Et si chacun montrait non pas son plus beau profil, mais ce qui le fait sourire comme un enfant, si chacun partageait ses bonheurs simples et non pas ses vanités creuses, peut-être que tout irait un peu mieux. C’est bon enfant, n’est-ce pas ? Et pourtant, c’est ce qui fonctionne toujours, la simplicité. L’élégance est simplicité, le sourire est simplicité, la sincérité est simplicité.

Pour autant, ça n’est pas simple d’être simple, et c’est pourquoi, chère Sophie, je vous remercie de nous en indiquer la voie.

Avec toute ma simplicité (à venir),

Loëry

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