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Un point c’est court : Semaine coup de poing pour le court-métrage

La 22ème édition du Festival de film court francophone (FFCF) à Vaulx-en-Velin s’est terminée en beauté samedi 9 avril par une soirée de remise de prix, faisant suite à une semaine de programmation intense. Retour sur cet événement qui s’inscrit désormais dans le paysage culturel lyonnais et ses alentours.

Une histoire de solidarité

Le festival Un point c’est court est né il y a de cela vingt ans de l’union de trois structures sociales vaudaises : la Maison des Jeunes et de la Culture (MJC), le centre social et culturel Peyri, et l’Espace Projet inter associatif. Elles œuvrent au lancement d’une dynamique culturelle et associative au cœur de la ville de Vaulx-en-Velin et auprès de ses citoyens, encouragés à participer de façon active à l’événement. Ainsi, la séance Courts au Sud donne carte blanche aux habitants sur la programmation, qui s’articule autour d’un invité de leur choix. Pour cette édition, il s’agissait d’Hakim Zouhani qui réalisait son premier film Rue des Cités.

De surcroît, un grand nombre de bénévoles, issus des centres sociaux, préparent le festival et sont initiés au cinéma et à la critique de films. Au terme de cette expérience, ils délivrent le Prix du Jury Jeune, qui revient cette année à Yohan Manca pour son Étoile Rouge.

C’est par cet accompagnement solidaire qu’Azzedine Soltani, actuel directeur artistique du festival et initiateur du projet, s’est lui-même révélé au septième art. D’abord inscrit dans un ciné-club vaudais, il en devient progressivement animateur, puis monte des séances plein air et enfin commence à travailler pour le cinéma Les Amphis, qu’il souhaiterait voir rayonner davantage. Mission accomplie, puisque sont à présent projetés dans ces salles des courts-métrages du monde entier. On retrouve dans l’esprit du festival une véritable envie de transmettre et de permettre à des jeunes issus de tous les milieux sociaux d’être touchés par l’art. Par ailleurs, le FFCF est en partenariat avec près de 27 établissements scolaires et 3500 élèves issus de Vaulx-en-Velin et ses alentours découvrent et votent pour des films tout au long de la semaine.

Festival Cinéma

La francophonie créatrice de lien et d’ouverture sur le monde

Si la francophonie est mise à l’honneur par le festival, c’est dans une volonté de la part de ses créateurs de toucher un public local. « Il existe une grande diversité de nationalités à Vaulx-en-Velin, explique Azzedine Soltani, essentiellement venus des anciennes colonies françaises sur le continent africain, avec lesquelles la langue constitue toujours un point de rattachement. Nous voulions encourager les Vaudais à venir voir des films de leurs pays, surtout que ce pan là du cinéma est rarement mis en avant par le système de diffusion classique. »  Le festival a effectivement pour ambition de faire découvrir des œuvres singulières et fortes, mais aussi de générer un échange autour. « La culture permet de rassembler les gens, elle est essentielle, estime Azzedine Soltani. La francophonie, c’est aussi l’idée d’une culture en commun, au sens large du terme. C’est à cela qu’on essaye d’ouvrir les jeunes de centres sociaux, cela fait partie de notre travail de leur offrir un accès à l’art. » Un partenariat avec la Ciné Fabrique, école de cinéma lyonnaise, a récemment été mis en place dans cette intention. Des étudiants peuvent désormais présenter les différents métiers du cinéma à la MJC.

Festival Un point c'est court Vaulx-en-Velin
Les criminels par Karaaslan Serhat © Festival Un point c'est court

Outre un public régulier depuis près de vingt ans, la francophonie est également un moyen d’ouverture à l’internationale. « Un réalisateur québécois était venu présenter un film ici, raconte Azzedine Soltani, et il a tellement apprécié notre festival qu’il a créé l’équivalence au Québec, Longue vue sur le court, avec lequel on échange beaucoup. » L’Alliance française de Lyon, école internationale de langue française, permet également à des étudiants étrangers de faire partie du jury.

Enfin, le Rwanda est mis à l’honneur pour cette 22ème édition.  « Il existe une histoire forte entre la France et le Rwanda, notamment par la coopération militaire, nous éclaire Azzedine Soltani. C’est aussi en cohésion avec la nomination de la nouvelle présidente de l’OIF (Organisation Internationale de la Francophonie), Louise Mushikiwabo, d’origine rwandaise. » Il s’agit aussi, dans la lignée des enjeux du FFCF, de mettre en valeur une production émergente et engagée politiquement.

Des œuvres engagées et passionnées

Environ 1500 films parviennent au FFIC chaque année et une centaine sont sélectionnés pour être diffusés autour de thématiques et de soirées spéciales. La compétition est ouverte à tous les styles, tous les genres, du documentaire à la fiction. Un poing c’est court pousse et encourage les jeunes réalisateurs à défendre leur vision, et leur offre le tremplin idéal pour accéder à un début de carrière « Les courts-métrages que nous recevons sont souvent aussi des premiers films, nous indique Azzedine Soltani, pour lesquels les auteurs ont dû se battre. Il y a aussi une forme de liberté propre au format court, apte à traiter de sujets plus marginalisés, et de façon plus incisive, plus percutante. »

Ainsi, en seulement dix minutes, Absence de Marc Hérichier parvient à nous faire ressentir la solitude glaçante d’un sdf, autour duquel gravitent de nombreux personnages, représentatifs des différents corps de la société. La plupart restent indifférents à sa misère, comme si une sorte de ligne infranchissable le séparait des « gens normaux ». Se superpose petit à petit à ces images de plus en plus rapides et cruelles le discours des politiciens et journalistes sur les victimes du froid parmi les sans-abris et leurs réflexions sur les mesures à appliquer. La technique d’animation 3D absolument époustouflante rends encore plus immersive cette expérience visuelle, qui nous amène à nous interroger sur la froideur de notre rapport à l’information.

De son côté, Les Criminels de Karaaslan Serhat nous montre à quel point il peut être absurdement compliqué de s’aimer librement dans certains pays. Dans une petite ville de Turquie, un jeune couple erre d’hôtels en hôtels, à la recherche d’un peu d’intimité. Mais sans contrat de mariage, ils ne sont acceptés nulle part. Ce court-métrage, porté par les deux acteurs, dénonce l’hypocrisie et la violence que peuvent engendrer certains dogmes religieux, surtout lorsqu’ils sont appliqués par des personnes mal intentionnées.

Toujours avec des thématiques très fortes, L’Inspection de Caroline Brai et Frédéric Bas, offre une réflexion sur le devoir de mémoire sous le prisme du clivage entre institutions et professeurs tandis que Tuk-Tuk de Mohamed Kheidr dénonce la précarité des femmes égyptiennes abandonnées par leurs maris.

Festival court métrage
Tuk-Tuk de Mohamed Kheidr, © Festival Un point c'est court

 On retiendra également, à l’issue de cette soirée de clôture, le court-métrage Moules-Frites de Nicolas Hu, nominé par les groupes scolaires du Prix Enfance, Confinés Dehors de Julien Goudichaud pour le prix spécial du Jury et enfin Jmar de Samy Sidali, gagnant du Grand Prix.

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