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Rencontre avec Jean-Baptiste Durand, concepteur de la lampe « brume », lauréat du Prix du Jury du Rado Star Prize France 2018

Cette année le Off de cette édition de la Paris Design Week met en lumière une quarantaine de créateurs engagés et soucieux de la bonne transition vers une consommation plus responsable – rado star- dont les créations reconnectent le citadin à la nature avec poésie. Ce lieu de partage réputé, reflet du design en évolution, est une manière d’en observer les changements. ll accueille cette année la vitrine internationale du design soit une quarantaine de jeunes créateurs, parmi eux Jean-Baptiste Durand, lauréat du Prix du Jury du Rado Star Prize France 2018, dédié au « Design inspiré par la nature ». 

Jean-Baptiste sort diplômé des Beaux-Arts de Saint-Étienne. En 2011 il entre au studio de Mathieu Lehanneur, pour qui il travaille jusqu’en 2016. Étudiant, il sent déjà une attirance pour la capitale et ses opportunités : « j’ai l’impression d’être un ingrat ou un enfant gâté. On se rendait compte qu’on bénéficiait d’un environnement propice, avec des manifestations tournant autour du design. » (Biennale du design de Saint-Étienne, ndlr) Mais, ce que je voulais, c’était juste habiter à Paris. On avait, certes accès, grâce aux Beaux-arts, à des concerts et des événements underground (je pense à l’association LA SERRE), mais j’avais le sentiment -peut-être à tort- qu’à Paris, il y avait tout en plus gros ! ». Jean-Baptiste s’inscrit dans un schéma classique de l’étudiant designer montant à Paris faire ses preuves. Gravissant peu à peu les échelons, il se fraie ainsi une place dans la ville qui l’inspirait plus jeune. Un ami lui conseille de répondre à un appel à projet, il profite de cette occasion pour mettre en lumière son potentiel en design produit grâce à une série de trois luminaires, présentés en avril à l’espace Pecquay à Paris. « L’idée pour cette série était de « lancer officiellement » mon activité en indépendant ».

En découle une série de trois luminaires, représentant à eux seuls trois échelles de perceptions de l’univers. Le premier, « Brume », se présente comme une installation autonome où l’on observe l’apparition d’une brume réflectrice au fond d’un vase en verre borosilicate. « C’est cette masse informe et impalpable qui capte la lumière et éclaire. L’inspiration de cette lampe, c’est une sorte de mélange, d’observations entremêlées… J’ai appris au fil du temps, que la lumière, pour être visible, doit être arrêtée, captée…« . Un système nébuliseur, appelé également mist-maker, permet à ce réflecteur naturel de diffuser une lumière, pour autant imperceptible et aérienne. « J’aime ce principe d’une matière qui semble changer d’état à la lumière (…) ce qui est encore plus magique, c’est que la brume, elle, est en perpétuel mouvement, elle se transforme en permanence… Chaque micro-particule qui transporte la lumière est volatile et éphémère, pourtant la lumière reste invariablement ». Un second luminaire, « Paysage Transparent » s’inscrit dans une représentation visuelle de la nature. Composée de PMMA, le créateur reprend ici la technologie du lumisheet comme surface éclairante.

Le luminaire éteint, les plaques de PMMA sont transparentes; allumé, les aspérités de la trame accrochent la lumière provenant des LEDS dans les tranches des panneaux, pour former un paysage géométrique illusoirement posé sur un rocher. « La lumière s’engouffre dans le quadrillage et opacifie le panneau tout en l’illuminant ». Le troisième, « Soleils« , fait quant à lui songer à un véritable objet spatial, prenant une hauteur suborbitale. Il consiste en deux spots s’insérant dans une rotation en 24h, le cycle démarrant à minuit et une minute. Les deux « soleils » sont alors en bas à gauche du socle et disparaissent à onze heure et 59 minutes, en ayant respecté les variations des couleurs et luminosité du jour : la lumière blanchit pour atteindre son zénith à midi et prend les teintes orangées du crépuscule de la fin du jour. « Soleils est une lampe qui vit au rythme de la journée, comme pour nous «reconnecter au temps qui passe ». Une interprétation poétique qui réconcilie l’œil humain à la réalité.

La vision de Jean-Baptiste s’entend en partie avec le thème de la PDW, qui, si elle se penche sur les aspects et enjeux écologiques du design, désire également décaler le regard de l’être humain sur son propre fonctionnement : il faut s’accorder à la planète. 

Ici Jean-B raccorde l’humain avec le temps, pour autant le jeune homme n’est pas sourd quant aux enjeux plus urgents.  L’heure est maintenant à la conscience et à l’éthique du care si défendue par Carol Gilligan, en vue d’un avenir plus juste et soucieux des générations futures. Un écho à la thématique de cette Design Week : « les préoccupations de pérennité et de durabilité des matériaux », le jeune créateur retrouve sens dans son action en résolvant ces questions cruciales pour le futur. Ne se revendiquant ni spécialiste, ni très documenté dans ce domaine, il espère toutefois un accompagnement qui lui fournirait les clefs pour accomplir cette mission : « Être un bon designer ne veut pas dire être un designer/ingénieur spécialisé dans le bioplastique… J’ai l’impression qu’on demande souvent aux « créateurs » (pour être large) de penser vert, de créer vert. Mais on ne s’invente pas ingénieur. Pour moi, ça doit être une concordance entre les différents corps de métiers ». Pour autant, Jean-Baptiste n’est pas réfractaire à l’ampleur du problème, il souhaite au mieux prendre en compte ces critères dans le processus créatif, par respect pour la nature et par altruisme vis-à-vis des populations pauvres, souvent premières victimes des désastres humains sur la Terre : « On peut avoir l’impression que les considérations climatiques sont simplement environnementales, mais en fait, elles sont sociales ».

www.jeanbaptistedurand.com
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