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VALENTIN sort son premier album Peinture Fraîche, entre musique et poésie

VALENTIN. Un prénom assené à la face du monde en caractères capitaux. Pour clamer son amour de la langue française peut-être, sa langueur, sa torpeur, sa beauté… VALENTIN est un parolier des temps modernes, empreint de l’humour d’un Bashung, de la mélancolie d’un Renaud, et de la sensibilité d’un Serge Gainsbourg. VALENTIN joue avec le mot, pour que le mot résonne, puis sonne. De ses « pérégrinations musicales », le TTT revient sur la sortie de son premier album le 13 novembre 2018 : Peinture Fraîche. 

Et comme VALENTIN le rappelle au travers d’une phrase emprunté à Serge  Gainsbourg :
« LA CHANSON FRANÇAISE RESTE À FAIRE. »


En choisissant ton prénom comme nom de scène, tu te dévoiles à ton public d’une façon particulière. Volonté ou sincérité ?

Je me suis posé la question au moment du premier EP, je ne trouvais que des idées alambiquées, et certains grands artistes comme Renaud ont plutôt bien réussi comme ça.

 

Quels sont tes processus créatifs et comment composes-tu ?

Je compose le plus souvent la nuit, avec une petite lumière bleue, entouré de mes claviers et de mes instruments.

L’écriture est plus variable, je concède aussi m’y livrer le jour, souvent dans des lieux où je suis en contact avec des gens comme les terrasses de cafés; j’ai besoin que ça vive, que ça bouillonne autour de moi, d’être connecté au monde… Ça me fait sortir de ma bulle, car l’écriture est toujours solitaire, et je considère que l’on prend moins de risques de se livrer lorsqu’on est seul.

Quant à l’album, j’ai emmené toute une tribu en Auvergne sur les terres familiales, après avoir maquetté chaque morceau.

 

Tu maîtrises de la langue française, et tes  textes sont empreints des influences de paroliers comme Serge Gainsbourg ou Alain Bashung. Quel rapport entretiens-tu avec ces individus : Sont-ce des liens purement musicaux, affectifs, où adhères tu à leurs idéologies musicales ?

J’adhère plus à des idées qu’une idéologie. Ce qui me marque, c’est lorsque Gainsbourg a dit dans un entretien à la fin de sa vie «  la chanson française reste à faire, il faut chanter les ascenseurs, le béton…». Variations sur Marilou reste une claque monumentale.

C’est à ce moment que j’ai pris conscience qu’il y avait des choses assez décalées à faire. Ce concept, je l’aimais déjà en poésie avec Francis Ponge et son parti pris intéressant, de faire un très beau poème avec une huître. Je ne voulais pas être mis dans la catégorie de variété française, qui reste trop lié à l’image du type et sa guitare sur la plage.

 

Pour entrer dans un espace littéraire plus conceptuel justement, quelle est ta vision de la littérature face à la chanson française ? La chanson française est elle un quatrain qui ne trouve pas son tercet, tel que tu le chantes dans « Stroboscopé » ? Peut-on passer outre le clivage gainsbourien de l’art majeur face à l’art mineur ?

La primauté de la littérature se ressentait dans le premier EP, avec le parti pris d’être très peu musical. Lorsque j’écrivais, j’imaginais certains textes qui pouvaient s’apparenter à des poèmes, comme j’imaginais certains textes mis en musique. Puis l’équilibre s’est créé entre texte et musique et j’ai compris l’intérêt du « joli ».

J’étais critique envers Christine and the Queen : Pourquoi venait-elle nous emmerder avec des mots anglais, alors que ses mélodies étaient sublimes. Puis j’ai compris que ces « tâches » dans de belles phrases permettaient de créer rythmiquement des choses intéressantes. Gainsbourg intégrait des mots anglais pour leur sonorité, parce qu’il trouvait que  certains mots swinguait.

« Bonnie & Clyde du papier
Mon corps ancré à tes délires
Irréprochable loyauté
Je t’ai suivi au bout du pire »

1er couplet de Mine de Rien

Quelle est ta vision du renouveau de la jeune scène française, avec l’explosion d’une Fishbach, de l’impératrice ou d’un Paradis, ou plus récemment d’une Clara Luciani et d’une Angèle ? 

Ça fait 6 ans que je me crée des playlists mensuelles pour toujours défricher ce qui se fait. Il y a des choses superbes : des Feu! Chatterton, des Grand Blanc, des Flavien Berger… Qui sont des vrais plumes et qui savent mettre en musique. Flavien Berger à l’audace d’expérimenter : entre le son le mot et surtout entre le mot et l’image.


Tu joues avec les mots dans tes titres, à l’image de « Compote de temps », ou dans « Droits d’odeurs » dans laquelle tu déclames « smells is  like white spirit ». Comment travailles-tu le verbe ?

L’idée c’est d’ouvrir le champ des possibles de l’interprétation. À la maison on écoutait Renaud, ou Boby Lapointe, j’ai lu certains poètes qui créaient du sens juste avec les sonorités des mots. Certains viennent comme ça, pour d’autres je note le jeu de mots initial et je le laisse maturer, de trois jours à parfois 6 mois.

 

Dans « Droits d’odeur », pourquoi mêler l’ouïe et l’olfactif ; la musique est elle autant synesthésie sensorielle que sentimentale ?

Depuis que je suis enfant j’ai des allergies au pollen, et les gens qui ne sont pas privés de leur nez ne peuvent pas comprendre. Depuis longtemps je souhaitais écrire quelque chose sur la perte des sens et donc d’essence. Je ne sais pas comment le morceau parlera aux gens mais il peut suggérer beaucoup, j’aime prendre les textes à part de la musique, idem pour la vidéo.

Dans ton titre « Stroboscopé », on y décèle le reflet d’une époque triste dans sa relation à l’autre, de la fête triste telle que la décrit Houellebecq par exemple, et de la catharsis artificielle que représente la « soirée » au XXIème siècle. C’est autobiographique ?

Ce n’est pas autobiographique dans le sens où je ne pense pas représenter ce anti-héros, mais c’est autobiographique car certaines choses sont inscrites dans mon vécu, comme ces énormes soirées étudiantes, à la fois pleines d’espoir et complètement futiles. Une fois les corps meurtris par l’alcool et le tabac, le temps révèle la terrible vacuité de ces moments.

D’un point de vue instrumental, tu alternes entre des vortex sonores très électro-pop dans « Stroboscopé » et des basses rock, plus profondes et saisissantes dans « Coco la Papaye ». Comment travailles tu entre ces différentes textures sonores ?

Il y a la couleur et la texture. La couleur dans la thématique des chansons et la texture car on passe de l’electropop a l’electrorock. Dans mes pérégrinations musicales, je me suis rendu compte que je détestais les catégories : une sous-catégorie de métal me dépasse un peu, par exemple. Mais il est clair que je viens du monde du rock, les touches électro m’ont été transmises par Gainsbourg. Les textures qu’il transmettait par le synthé étaient novatrices pour l’époque. Je trouve le guitare-basse-batterie trop simple, les sonorités électro font plus facilement rentrer dans un univers.

La cover de l’album Peinture Fraîche, sortie le 13 novembre 2018.

 

Pour demeurer dans la texture : le titre de l’album est peinture fraîche. La finalité est-elle qu’elle se fige et qu’elle sèche, et parachever ton œuvre musicale ?

J’imagine effectivement quelque chose en devenir, dans une perpétuelle recherche, le jour ou j’aurais fait un truc figé c’est que je serais devenu un con !

Quel rapport entretiens-tu avec la scène ?

La scène est jouissive, je peux déclamer, y apporter de la vie, en ajoutant l’aspect visuel, et surtout je ne suis pas seul. Pour « Coco la Papaye » on peut s’attendre à voir quelqu’un débarquer en perroquet… Sinon j’aime la spontanéité, je n’aime pas pousser les gens à s’arrêter pour entonner un refrain, les choses doivent se faire d’elles-mêmes.

Quels sont tes projets ?

Je travaille sur quelques instrumentales, je ne sais pas ou elles iront mais ce que je peux affirmer c’est qu’elles sont très planantes… Composées cet été son mon cerisier…

Le TTT s’intéresse avant tout à l’esthétique dans le vêtement. As-tu une vision de toi en tant qu’artiste par rapport à la mode ?

Je m’y intéresse en tant que citoyen et réalisateur. J’ai notamment travaillé avec des marques de slow-fashion à Madrid et à Paris, comme Faguo* ou Loume. Sinon je suis assez sensible à des marques comme Vega, j’essaie de m’en vêtir le plus possible, ce virage est essentiel face à une fast-fashion pernicieuse.

* Faguo est une marque de slow-fashion créé en 2009, orienté entre le casual et le trendy. Chaque fois qu'une pièce est produite, 1 arbre est planté en France. L'initiative a déjà permis de replanter 1 200 000 arbres, tout en proposant des produits avec une empreinte carbone réduite.
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