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Bilan Cannes 2021 : du cœur, des choix et des retrouvailles

Après le sacre de Titane samedi 17 juillet, l’heure est venue de faire les comptes de cette édition. 35 films vus en 11 jours – soit bien plus d’heures que celles dormies la nuit –, beaucoup de satisfaction et au moins autant de fatigue : c’est le premier bilan, reproductible ad nauseam au fur et à mesure des années de Festival, que l’on peut tirer.

Pourtant, le temps semblait suspendu à l’ouverture cette année, comme si chacun attendait de voir si masqués et pass sanitaire en poche les festivaliers seraient présents (et de quelle manière). Ce fut d’abord et comme toujours un grand élan de cinéphilie, lancé en trombe dès le premier jour avec Annette qui méritait a minima son Prix de la mise en scène. On assistait aussi sans le savoir au premier grand film de la Croisette sur l’intime familial, rapidement suivi par Cahiers Noirs. Si tous les films en traitant étaient inégaux, ils furent les témoins d’une sélection qui semblait obnubilée par le rapport des individus à leur foyer. L’exercice consistant à apprécier une sélection par rapport aux thèmes principaux dégagés est toujours périlleux, on l’avait précisé en ouverture mais même le palmarès n’a pu l’ignorer. De fait si Titane a beaucoup de défauts, l’émotion de Julia Ducournau et son entrée fracassante dans l’histoire de Cannes avec une Palme aussi clivante permet de conclure avec liesse. D’ailleurs, du cœur et de l’émotion, il y en avait aussi dans cette cérémonie de clôture lunaire entre gaffes, rattrapages et ex-aequo inattendus : au moins, personne ne se sera ennuyé.

Cérémonie de clôture Festival de Cannes

Des films à la pelle

En même temps il y avait peu d’inquiétude quant à la possibilité d’un ennui vu l’étendue de la sélection. Celle-ci aura donné des maux de tête au moment de faire des plannings, ce en devant composer avec une billetterie en ligne parfois capricieuse, perfectible mais finalement pleine de promesses pour 2022. On regrettera en revanche l’existence de Cannes Première, nouvelle sélection « branchée » ne disant pas son nom : il fallait mettre ceux qui méritaient la compétition comme Serre-moi fort à leur place et laisser de l’espace pour d’autres sélections comme la Quinzaine des Réalisateurs. On aura ainsi manqué certains films par temps, notamment des jours à 4-5 films dont 3 étaient de la compétition. Mais l’année était particulière et il fallait visiblement montrer un grand nombre d’œuvres (Benedetta attendait cela depuis deux ans) : on attendra juste un peu de répit pour 2022.

Cannes, ses habitués et son cosmos

The French Dispatch, Drive my car et surtout Memoria : le Festival était aussi l’occasion de retrouver des auteurs aimés et pour eux de se replonger dans Cannes. Apichatpong Weerasethakul attendait une deuxième Palme (et nous aussi) pour son sixième passage à Cannes quand Ryūsuke Hamaguchi recevait un deuxième prix après Berlin en début d’année. L’édition nous aura aussi rappelé l’importance de la salle de cinéma et de la joie que l’on pouvait retrouver à l’extinction des lumières, portée par la voix autoritaire de Pierre Lescure rappelant de bien garder son masque. Le rappel aussi que les larmes pleurées ensemble étaient souvent des moments de communion privilégiés. Le maître-mot est peut-être là, « privilégiés » : privilégiés d’avoir assisté à l’un des plus grands évènements mondiaux encore une fois sans encombre, d’avoir pu faire la fête dans les salles et à l’extérieur. Finalement, d’avoir trouvé dans cette bulle une forme d’insouciance bienvenue car on la croyait envolée : on aimerait éviter parler d’un retour au monde, mais la presque-normalité de ce Festival aura rappelé en contrechamp immédiat qu’on avait oublié que cela était possible. Le cinéma mérite bien une messe…

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