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Festival de Cannes : Une ouverture dans son époque

Quelle plus belle image que cette affiche de Memoria (Apichatpong Weerasethakul), dévoilée la semaine dernière, pour caractériser la 74ème édition du Festival de Cannes qui s’ouvre demain ? De longs mois sans films de salle pour se retrouver soudainement dans le grand bain cannois pour 11 petits jours. Difficile ainsi de savoir si l’on s’apprête à sortir d’une longue torpeur ou que l’on serait en passe d’y entrer, tant on vacille face à l’ingurgitation annoncée. Rappelons-le ici : après une édition 2020 « labellisée », sans manifestation physique, ni jury, ni palmarès, Thierry Frémaux souhaitait faire de ce Cannes 2021 le premier événement mondial post-pandémie. À ce titre, les vannes ont été grandes ouvertes : 24 films en compétition ; 20 à Un Certain Regard ; une nouvelle sélection « Cannes Premières » qu’on imagine en antichambre de la compétition vu les auteurs qui s’y côtoient – Mathieu Amalric, Charlotte Gainsbourg ou Hong Sang-soo. Tout cela sans compter le hors compétition, les séances spéciales ou les sélections parallèles (Quinzaine des Réalisateurs et Semaine de la Critique) : s’il fallait jongler avec le merveilleux programme de 2019, 2021 nous laissera face à des choix cornéliens. Car tout voir, c’est bien ce que l’on souhaiterait.

Affiche Memoria

Pour les grands retours déjà : Leos Carax en ouverture pour Annette, 11 ans après l’immense Holy Motors ; Memoria donc, pour une éventuelle deuxième Palme d’un cinéaste n’ayant jamais déçu jusque-là ; les films de Kirill Serebrennikov et Ryūsuke Hamaguchi, lesquels avaient déjà impressionné en 2018 ; Ildikó Enyedi avec L’histoire de ma femme, après avoir remporté la Caméra d’or en… 1989 (et un Ours d’or à Berlin en 2017). Côté entrants, on guettera l’arrivée en compétition de Julia Ducournau avec Titane, révélée à la Semaine en 2016 avec Grave et celle de Nadav Lapid avec Le genou d’Ahed, 2 ans après son Ours d’or pour Synonymes. Mia Hansen-Løve découvrira aussi la compétition avec Bergman Island, 12 ans après son dernier passage par Cannes au Regard. Enfin, Joanna Hogg présentera The Souvenir : partie 2 à la Quinzaine, après une partie 1 acclamée outre-Manche en 2019 et qui sortira sur nos terres en décembre.

Benedetta Cannes
Titane Cannes 2021

On pourrait étirer cette liste à la Prévert à volonté tant cette édition est dense, sans pour autant rapporter cette densité à « l’état du monde » que serait le reflet de cette édition, selon l’expression galvaudée. Ainsi, un Benedetta (Paul Verhoeven) déjà prêt pour 2019 (!) côtoiera des films tournés pendant ou après les confinements : des films d’avant et ceux d’après réunis dans une drôle de mise en perspective. Pour autant, il reste toujours singulier de voir ce que peut raconter une sélection, pour la somme des thèmes ou des angoisses, pour la fabrique perpétuelle de nouvelles images. Que peut bien dire le cinéma viriliste de Jacques Audiard dans Olympiades sur un scénario co-écrit avec Léa Mysius et Céline Sciamma ? Combien de nouveaux et de nouvelles cinéastes au Regard, promise comme une section renouvelée, et à la Semaine, pourvoyeuse de talents futurs ? (sont passés pour leur premier film Julia Ducournau donc, mais aussi Arnaud Desplechin, François Ozon…)

Annette

C’est donc une édition inédite qui attend les festivaliers, à l’allure étrange, dantesque mais excitante. La première depuis 2 ans aussi, et alors que le monde a bien changé : il sera forcément très beau de voir ce que peuvent nous dire les images passées et celles à venir. Le tout dans la fête sans cesse en marche qu’est Cannes, pandémie ou non.

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